Qui a besoin d’un capital-risqueur ?

Après m’être demandé s’il faut un business plan, je me demande maintenant qui a besoin d’un Venture-Capitalist (VC). En fait, j’ai en quelque sorte déjà répondu à la question, puisque Digital Airways, dont je m’ocupe, existe depuis 1998 sans financement extérieur. Mais la question mérite d’être posée. D’une manière générale, un projet innovant doit-il être financé? A cette réponse,  il convient sans doute de répondre "ça dépend" ou précisément "ça dépend du stade du projet".

Dans son livre "Built to Last", Jim Collins mentionne la position de Hewlett Packard, qui avait institué une politique de "pay as you go", ou bootstrapping, c’est à dire une politique interdisant l’endettement long terme de l’entreprise. La finance moderne a montré l’intérêt de l’endettement comme stratégie financière, mais les modèles théoriques sur lesquels une telle preuve est basée ne prennent pas en compte un élément essentiel d’une politique d’absence de dette: elle oblige à une discipline totale. En refusant de s’endetter, HP s’est obligé à apprendre à financer ses projets tant bien que mal de manière entiérement interne. En apparence irrationelle, cette politique a formé toute une génération de managers disciplinés, aptes à opérer à un niveau d’efficacité et de souplesse généralement présent seulement dans les petites structures. La dette érode donc la discipline entrereneuriale. De même, et à l’opposé de la plupart des entreprises high-tech, HP a refusé tout investissement externe, en particulier de VC, parce que, selon les mots mêmes de Bill Hewlett et David Packard, "les VC poussent les entreprises à grandir trop vite, et si vous grandissez trop vite, vous perdez vos valeurs". Dans la mesure où Collins estime que l’existance de valeurs-clé de l’entreprise est un facteur essentiel de la pérennité et de la performance de long terme de l’entreprise, l’affaire est sérieuse.
Une fois cela dit, lorsque la startup, ou le projet interne, a passé sa période d’incubation et que la croissance forte est au rendez-vous, c’est à dire qu’elle a franchit le "chasm" pour reprendre l’expression de Geoffrey Moore, il peut devenir essentiel de disposer de beaucoup d’argent, sans quoi l’asphyxie guette. L’arrivée d’un VC permettra donc, une fois le concept business au point, d’apporter le carburant de la fusée nécessaire pour ouvrir ce bureau en Chine si important… Tant que votre concept n’est pas au point et qu’il n’a pas été validé par quelques premiers clients, mangez des nouilles et bootstrappez.

2 réflexions au sujet de « Qui a besoin d’un capital-risqueur ? »

  1. La question n’est peut-être pas tant « qui a besoin d’un capital risqueur » mais « A quoi peut servir un capital risqueur ».
    Cette seconde permet de citer de nombreux sujets sur lesquels un capital risqueur peut valablement intervenir. Si on met en face de ces questions l’offre effective des VCs, je crains alors que peu de cases soient cochables et n’est-ce pas là le vrai regret ?
    Curieusement, les meilleurs « partners » ne semblent pas se réserver les TIC…

  2. Un autre bon exemple est celui d’ARM, projet interne d’Accorn Computers qui avait refusé des crédits spécifiques aux porteurs du projet…

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