Ségolène, le Maréchal et Venise

Même avec la présidentielle qui s’annonce, qu’on ne s’attende pas à ce que ce blog prenne des positions politiques, et encore moins qu’il recommande de voter pour un tel ou un tel (au nom de quoi d’ailleurs le ferait-il). Ce n’est pas une raison pour s’interdire de commenter ça et là les déclarations ou projets ayant un rapport avec l’innovation et l’entrepreneuriat. Vu comment les choses se présentent, hélas, il semble que ces sujets ne seront pas vraiment dominants dans la campagne, nous n’avons donc pas constitué d’équipe spéciale en la matière.
Prenons quand même quelques instants pour réagir aux déclarations de la star du moment, Ségolène Royal. Selon elle, il faut rétablir les valeurs du travail, de la famille et de la patrie. Rien de moins. On peut défendre chacune de ces valeurs séparément, mais mises ensemble, elle rappellent évidemment de sombres choses, et il est regrettable qu’à l’heure où notre pays a du mal à faire face à son avenir, le néo-pétainisme lui soit présenté comme perspective, et par une femme de gauche, qui plus est. C’est d’autant plus inquiétant que les positions – symptomatiques – de Mme Royal en matière d’OGM sont connues: elle n’en veut pas – sans doute parce que la terre, elle, ne ment pas. Il y a un siècle, elle aurait sans doute été contre l’automobile car ça faisait avorter les femmes, et il y a quelques centaines de milliers d’années, elle aurait contre le feu, car c’est dangereux (ça peut tuer des gens voyez-vous). Est-il normal que l’avenir inquiète à ce point nos concitoyens que nos élites politiques cherchent désespérément des "valeurs" rurales pour les protéger? Un retour à la terre, à la tradition?

Dominique Moïsi racontait récemment dans un article des Echos la réflexion que lui avait faire un éminent homme d’affaires asiatique: "Vous, l’Europe, vous vous transformez peu à peu en pays du tiers-monde. Non seulement vous posez les mauvaises questions – Constitution européenne, Etat-providence, retraites – mais vous y apportez systématiquement les mauvaises réponses." A quoi Moïsi ajoutait "si les performances de l’Europe devaient continuer à se dégrader, les Asiatiques y verraient-ils encore un modèle ? Le Vieux Continent deviendrait alors, dans le meilleur des cas, un « conservatoire de la démocratie », si ce n’est, tout simplement, une sorte de Venise moderne, c’est-à-dire un lieu à visiter avec nostalgie pour son glorieux passé et présentant quelques ressemblances avec un musée."
A Pétain qui disait aux Français, le coeur serré, qu’il fallait cesser
le combat, de Gaulle répondait que la France n’avait pas perdu la
guerre et qu’il fallait continuer à se battre. C’est ce message-là que
nous aimerions entendre, un message d’optimisme – la France ne va pas
si mal que ça, tourné vers l’avenir et à la portée pratique – la solution réside en chacun
de nous, que peut-on faire pour faire avançer les choses.

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