Quatre conseils à un jeune responsable innovation

Il m’arrive souvent de superviser des travaux de mémoire sur l’innovation ou de rencontrer des innovateurs et, toujours, la question qui revient est: comment rendre mon organisation plus innovante? La plupart du temps, ces organisations sont parfaitement conscientes de la nécessité d’innover. Souvent, elles ont organisé un séminaire en extérieur avec la direction générale, séminaire qui s’est conclu par la définition de plusieurs piliers stratégiques dont l’innovation fait partie. Puis la communication a pris le relais: un film a été produit, qui se termine avec un message du PDG, diverses plaquettes et brochures ont été distribuées, un intranet mis en place et, si l’organisation est vraiment sérieuse sur la question, un responsable innovation a été nommé en fanfare. Et c’est là que les ennuis commencent…

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Conférence de Raghu Garud: “Complexity arrangements for sustaining innovation: lessons from 3M Corporation”

Dans le cadre du séminaire “Innovation” organisépar l’Ecole Polytechnique et Mines ParisTech, le professeur Raghu GARUD (Penn State University, USA) donnera une conférence sur le sujet suivant: “Complexity arrangements for sustaining innovation: lessons from 3M Corporation” le 27 mai  2010  de 17 h 00 à 19 h 00 à l’Ecole des Mines-ParisTech.

J’aurai l’honneur d’être discutant, en tandem avec Franck Aggeri (Mines ParisTech).

Brève présentation de la séance :
Les processus d’innovation sont complexes. C’est au travers de l’interaction parmi les acteurs et avec les technologies que la nouveauté émerge. Même lorsqu’elle sont régies par des règles simples, de telles interactions peuvent générer des dynamiques temporelles non-linéaires. Etant donnée cette complexité, comment une organisation peut-elle maintenir l’innovation pour assurer vitalité et croissance continue?
Sur la base d’une étude approfondie des pratiques d’innovation de la société 3M, nous identifions comment les combinaisons de pratiques – que nous conceptualisons comme des arrangement de complexités – permettent des orientation simultanées multiples pour les agents et ainsi facilitent l’innovation continue.

Participation à la séance gratuite mais réservation obligatoire en envoyant un email à

laurence (point) gillier (at) polytechnique (point) edu

Nespresso: évidence du produit et complexité du processus d’innovation

Le développement de produits devenus évidents a parfois été un enfer. L’une de mes questions favorites lorsque je donne un cours sur l’innovation est de demander aux participants combien de temps ils pensent que Nestlé a mis pour développer et lancer avec succès sa machine à café Nespresso. Alors, votre réponse? Un an? Cinq ans? Eh bien non. La réponse c’est vingt-et-un ans. Parti d’une technologie licenciée à l’institut Battelle par Nestlé en… 1974, Nespresso ne deviendra rentable qu’en 1995. Il aura donc fallu 21 ans à l’entreprise pour “réussir” l’innovation Nespresso.

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RAZR: le succès improbable de Motorola ou l’innovation révisionniste

Vous avez sans doute entendu parler du RAZR (prononcer Razor), le téléphone star de Motorola, ultra-fin, qui a marqué le début de la renaissance du pionnier de la téléphonie mobile. Selon l’histoire officielle, la RAZR est le produit d’un redressement de l’entreprise soigneusement planifié…

Au détour d’un forum rendant compte d’une discussion d’un ingénieur de Motorola, on apprend que la réalité est quelque peu différente.

Apparement, le développement du RAZR a été lancé par un ingénieur et son équipe, et le projet a été… rejeté par la direction de l’entreprise. L’ingénieur est donc allé en Chine, seul, trouver un sous-traitant (Outsourced Design and Engineering), et est retourné voir la direction, …avec plus de succès. On retrouve un phénomène semblable chez Intel avec les micro-processeurs en 1986.

Evidemment, quand on connaît l’histoire, la présentation officielle fait sourire: comment l’entreprise fut innovante, comment le RAZR faisit partie d’un plan ingénieux, comment on peut reconstruire, a posteriori, ce qui finalement fut en fait une réussite totalement inattendue, due à l’initiative obstinée d’une personne.

Pourquoi le RAZR a-t-il été rejeté, au fait? Apparemment, parce qu’il manquait de fonctions. Très poussé sur le plan du design, il est en revanche relativement pauvre en termes de fonctions. Lancer un tel produit était totalement contraire à la culture de Motorola, une entreprise d’ingénieurs à la pointe de la technologie depuis 75 ans.
S’il fallait une preuve que Motorola n’attendait rien du RAZR, elle est fournie par son PDG, Ed Zander. Alors que l’entreprise connaissait de grosses difficultés dans ce secteur, au point de songer sérieusement à céder une activité considérée comme sans avenir, le PDG donne une conférence aux analyses financiers en septembre 2004, un mois seulement avant la sortie du produit, …et ne le mentionne même pas!
Le redressement de Motorola, et son adaptation culturelle au marché grand public est donc le résultat, et non la cause, de la réussite inattendue d’un produit-phare.
L’innovation n’est pas certes le fait du hasard, mais souvent de l’initiative individuelle qui réussit à franchir les obstacles que s’évertuent à mettre en place les gestionnaires. Motorola, cela dit, s’est bien ratrappé, comme l’on fait avant Sony, sauvé par la Playstation inventée par un ingénieur longtemps ignoré de la direction, Apple sauvé par l’iPod que l’entreprise n’a pas inventé elle-même, et d’autres encore.