L’ordre règne à Varsovie: quand les processus tuent la créativité de l’organisation

Une organisation sans processus ne peut pas fonctionner au-delà d’une certaine taille. Pourtant, il arrive souvent que le développement de processus étouffe la créativité, c’est-à-dire la capacité de l’organisation à continuer de répondre aux défis de son environnement. Comment résoudre ce paradoxe? La clé réside dans la conception que l’on a de ce qu’est un processus.

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Transformation: Une entreprise en croissance peut-elle rester elle-même?

Un des articles de foi du management est que passée la phase entrepreneuriale, vue comme créative et brouillonne, une entreprise en croissance doit se structurer et adopter les « bonnes pratiques » de gestion pour se conformer aux normes institutionnelles: management professionnel, structures, processus bien définis, méthodes établies, etc. En somme abandonner sa singularité. J’ai rencontré de nombreux dirigeants qui en sont convaincus, mais il existe heureusement quelques exceptions, des dirigeants qui résistent courageusement à ce modèle mental et qui n’ont en général pas à le regretter.

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Innovation: Les « Gletkin », ces carriéristes qui vous tuent de l’intérieur

Je discutais récemment avec un entrepreneur dont la startup est désormais en forte croissance et qui a déjà atteint la centaine d’employés. L’un de ses principaux soucis, me disait-il, est d’arriver à conserver une culture entrepreneuriale et à éviter que celle-ci ne se dilue, ce qui ne va pas de soi quand les recrutements se succèdent à bon rythme. Rien n’est plus important en effet: on dit souvent que le poisson pourrit par la tête, mais ce n’est pas toujours vrai. Souvent, il pourrit par les pieds, de l’intérieur, un syndrome que j’ai bien envie d’appeler syndrome de Gletkin. Voyons en quoi cela consiste.

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« The Growth Gamble », une pierre dans le jardin de l’innovation

On vous l’a dit et répété, seule l’innovation permet à l’entreprise de croître sur le long terme; l’innovation est donc cruciale pour l’entreprise, sa seule chance pour lutter contre la concurrence des pays émergents. Tous le monde est d’accord là-dessus. Tout le monde, sauf Andrew Campbell et Robert Park, deux professeurs à Ashridge Business School, et auteurs de The Growth Gamble – When leaders should bet big on new businesses and how to avoid expensive failures, trop discrètement paru en 2005. Leur constat initial est le suivant: la plupart des entreprises qui lancent des initiatives fortes de croissance sous la forme de grand projet échouent en général. Les auteurs donnent deux exemples parmi tant: McDonald’s et Intel. Le cas Intel est particulièrement intéressant car il est l’objet des travaux de Robert Burgelman, dont nous avons déjà parlé sur ce blog. Intel a mis en place un système d’intrapreneuriat permettant à chaque employé de développer des idées qu’il peut avoir. Selon Burgelman, seule cette approche permet l’innovation et donc la découverte de nouveaux marchés. Oui, sauf que Intel a régulièrement échoué dans ses initiatives et n’a jamais réussi à sortir de son coeur de métier qui est le microprocesseur.
Campbell et Park sont d’accord avec Clayton Christensen pour dire que l’innovation radicale est source de croissance durable, mais ils contestent la portée de l’énoncé par deux arguments: d’une part, les innovations radicales qui changent les industries n’arrivent pas si souvent que ça. Peut-on dès lors structurer une entreprise pour un raz de marée qui n’arrivera probablement jamais? Mieux vaut, selon eux, bien exécuter l’innovation incrémentale et explorer les pistes de croissance autour de son coeur de métier. D’autre part, se lancer dans une innovation radicale est très dangereux pour l’entreprise, qui sort de son terrain connu. L’attractivité d’une opportunité n’existe donc pas en elle-même, mais toujours en relation avec l’entreprise qui décide de l’exploiter. Voilà donc bien une pierre dans le jardin de « Stratégie océan bleu » de Kim et Mauborgne.
Sur cette base, les auteurs proposent un outil intéressant permettant d’évaluer les nouvelles opportunités, notamment sur la base de l’adéquation avec le l’activité actuelle.

La critique de la littérature sur l’innovation est intéressante et les auteurs n’ont pas forcément tort lorsqu’ils expliquent que la révolution ne peut pas être faite tous les jours ni surtout par tout le monde. Il n’en demeure pas moins vrai qu’une entreprise qui ignore cette dimension le fait à ses risques et périls, et les bouleversements ont plutôt tendance à apparaître plus que moins fréquemment. On reprochera aux auteurs notamment une conception passive de l’opportunité: une opportunité, selon eux, c’est quelque chose qui existe ‘comme ça’, et que l’entreprise peut évaluer. Mais la littérature sur l’entrepreneuriat a précisément montré que c’est beaucoup plus compliqué que ça: une opportunité se construit au moins autant qu’elle se découvre. Pour cela, il faut bien entreprendre des démarches d’innovation, risquées et parfois qui se terminent mal, celles-là mêmes que Campbell et Park déconseillent. Au final, leur prudence quant au ‘tout innovation’ et en particulier sur les extrêmes de type ‘chaos créatif’ à la Gary Hamel (qui par ailleurs écrit la préface de l’ouvrage!) est bienvenue, mais leur critique de l’importance de l’innovation est néfaste. Il existe un juste milieu entre l’extrémisme d’Océan Bleu et la passivité d’éternel suiveur, et c’est bien la difficulté de le trouver.

A noter, pour les chercheurs, une annexe très intéressante où les auteurs comparent leur travail à celui de plusieurs auteurs dans le domaine des stratégies de croissance. Le livre chez Amazon.