Stratégie non prédictive (3): Les systèmes non linéaires et la nature du problème

Cet article est le troisième d’une série sur l’incertitude et la stratégie non prédictive.

En dépit des développements théoriques considérables en stratégie d’entreprise au cours des cinquante dernières années, les organisations continuent à être perturbées par des événements qu’elles n’ont pas vu venir, ou par des événements qu’elles ont vu venir, mais qu’elles ont été incapables d’éviter ou dont elles ont été incapables de tirer parti. Dans cet article, nous revenons en détail sur la nature du problème pour essayer de la caractériser.

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Stratégie non prédictive (2): Connais-toi toi-même ou le biais identitaire

Dans la première partie de cette série, nous avons examiné le défi que représentent les environnements non linéaires et essayé de montrer comment, lorsqu’on est confronté à un tel environnement, il vaut mieux consacrer son énergie  à une compréhension profonde de la situation présente plutôt qu’à essayer de prédire son évolution. D’où notre recommandation d’une approche non prédictive de la stratégie.

Les systèmes non linéaires peuvent être trouvés dans la nature (en météo par exemple), mais ils sont particulièrement fréquents et problématiques quand ils impliquent des dimensions humaines. Bien que de tels systèmes puissent parfois afficher des régularités sur de longues périodes, donnant ainsi l’illusion d’être intrinsèquement linéaires, la plupart des grandes questions politiques, économiques et commerciales sont essentiellement non linéaires car imprégnées de faits sociaux. Ce que ces systèmes, centrés sur des questions humaines, ont en commun, mais qui est souvent négligé, est que l’on ne peut pas les traiter comme s’ils étaient des problèmes de sciences naturelles. Dès lors, comment vous définissez la question à laquelle vous avez affaire dépend aussi de qui vous êtes.

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Stratégie non prédictive (1): Une compréhension profonde bat la prédiction

Ce billet est le premier d’une série sur la stratégie en environnement complexe et incertain.

Les environnements et les problèmes auxquels sont confrontés les entreprises sont plus complexes que les modèles traditionnels de la stratégie ne le laissent penser. Ils présentent des niveaux élevés d’incertitude (absence objective d’information), ils peuvent se comporter de façon non linéaire (une petite variation peut entraîner de grandes conséquences, ou vice versa). Les marchés émergents, les nouvelles technologies, le système de santé ou la système financier sont des exemples typiques d’environnements non linéaires. Ces environnements sont en outre vulnérables aux “cygnes noirs“, une expression forgée par Nassim Taleb pour désigner des évènements à faible probabilité mais à fort impact qui perturbent même les meilleures stratégies. Une difficulté supplémentaire pour les stratèges est que les environnements non linéaires apparaissent souvent comme linéaires pour une période prolongée (pensez aux prix de l’immobilier aux  États-Unis). En conséquence, certains concluent que ce qui semble être un modèle essentiellement linéaire (les prix fluctuent un peu autour d’une “tendance stable à long terme”), est réellement linéaire dans la réalité – avant qu’un changement radical ne se produise et remette entièrement en question les modèles que l’on pensait solides (par exemple, une baisse de prix spectaculaire de l’immobilier aux États-Unis à partir de 2008). En bref, on suppose qu’un environnement est linéaire et prévisible, alors qu’en fait la continuité que nous observons n’est qu’un cas particulier vérifié pendant une durée limitée.

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