Gaston Berger, mort d’un accident de voiture en 1960, est un penseur français insuffisamment connu. Il en effet l’un des rares à s’intéresser à l’avenir. Selon lui, l’avenir a été oublié par les philosophes. Il contribue à créer le Centre International de Prospective, sur la base d’un constat: les décisions s’inspirent trop du passé, qui pourtant ne contient ni ne préfigure l’avenir. L’ouvrage « De la prospective – Textes fondamentaux de la prospective française 1955-1966 » rassemble les textes essentiels de ce courant de pensée, écrits par Gaston Berger, Pierre Massé et Jacques de Bourbon-Busset.
L’idée de départ est la suivante: « L’avenir n’est pas ce qui vient après le présent, mais ce qui est différent de lui. » En cela, Berger s’éloigne de la prévision en en soulignant les limites, avertissement qui résonne étrangement bien à notre époque. En conséquence, cet avenir doit être construit, d’où la célèbre citation de Berger: « Demain ne sera pas comme hier. Il sera nouveau et dépendra de nous. Il est moins à découvrir qu’à inventer. » Berger, qui comptait naturellement beaucoup sur l’enseignement pour inventer cet avenir (il était directeur de l’enseignement supérieur à l’éducation nationale), cite Paul Valéry qui écrit, à propos de l’enseignement « … il s’agit de faire de vous des hommes prêts à affronter ce qui n’a jamais été. » Voilà qui est intéressant. Or comment peut-on atteindre cet objectif sachant que l’enseignement est essentiellement tourné vers le passé, avec l’étude de ses grands hommes et de ses méthodes « éprouvées »?