Hegel: inspirateur de Marx, apologiste de l’Etat… et défenseur du marché

L’émergence de la société marchande à la fin du XVIIe siècle et les conséquences multiples de son plein développement dans le siècle suivant n’ont pas laissé les philosophes indifférents. Si nombre d’entre eux l’ont durement critiquée, d’autres en ont au contraire loué les vertus. C’est notamment le cas de Voltaire et, sans doute de façon surprenante, de Georg Wilhelm Friedrich Hegel, un philosophe majeur, pourtant apologiste de l’Etat. Peut-on défendre à la fois l’Etat et le marché? C’est ce qu’il fait.

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La performance des entreprises, un enjeu sociétal

La performance des entreprises est souvent perçue comme n’ayant aucun impact sociétal. Elle semble ne relever que du strict domaine financier et ne concerner que ses actionnaires, et personne d’autre, et à ce titre est moralement suspecte. On est content pour l’entreprise qui a de bons résultats, mais on ne voit pas trop l’intérêt et, à la limite, souvent franchie dans notre pays, on soupçonne même que cette performance se fasse au détriment de la société. Pourtant, la performance des entreprises représente un enjeu sociétal majeur, une observation faite il y a déjà bien longtemps par Peter Drucker, le père de la pensée managériale, et qui reste entièrement d’actualité.

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Le marché comme une institution vivante: Pourquoi il faut réhabiliter Adam Smith

[Version en Anglais ici]

Interrogez n’importe qui ayant quelques connaissances en économie sur Adam Smith, et on vous dira probablement que le grand économiste est le symbole du capitalisme débridé et déshumanisé, avec sa fameuse “main invisible”, qui semble nous transformer en machines à la merci d’un mécanisme qui nous échappe, et sa promotion de l’égoïsme. C’est l’idée que j’en ai moi-même eu pendant longtemps. Et pourtant, cette vision ne reflète pas ses écrits qui ont au contraire promu le marché comme une institution vivante gouvernée par une éthique. Compte tenu de son importance dans la pensée économique, et à l’heure où le rôle sociétal de l’entreprise et du marché est en question, il est important que le débat ne soit pas basé sur une caricature de sa pensée.

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Les vilains petits modèles mentaux français ou la (vraie) leçon de l’affaire Orpéa

Dans un livre paru le 26 janvier, l’auteur et journaliste Victor Castanet accuse Orpéa, leader européen des maisons de retraite, de maltraitance sur des résidents de ses établissements et de rationnement de soins et de fournitures médicales pour réduire les coûts. L’affaire connaît un retentissement considérable. Elle donne surtout à la France l’occasion de se livrer à son sport favori, le bashing du profit. Car la cause semble être entendue: c’est sa recherche effrénée qui explique les maltraitantes dénoncées dans l’ouvrage. “Orpéa, les profits et le malaise”, titre ainsi l’émission C dans l’air. Et si on allait un peu vite?

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Ni saint, ni héros, ni victime: et si on revendiquait la figure bourgeoise de l’accomplissement?

Quelles figures devons-nous prendre pour modèle? L’historien Arnold Toynbee montrait que toute civilisation s’inspire de figures symboliques pour définir ses valeurs dominantes et structurer ainsi sa vie sociale. À côté des figures traditionnelles de saint et de héros s’ajoute aujourd’hui celle de la victime. Aucune des trois pourtant ne traduit l’essence de notre société moderne, celle de l’accomplissement, c’est-à-dire de l’individu qui se réalise par son travail créatif. Et si il était temps de remédier à cette absence?

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Et si le capitalisme était moral après tout?

Que le capitalisme soit immoral est une idée qui semble aller de soi. L’image des fabricants de vaccin anti-Covid tirant profit de la pandémie faisait ainsi encore recette récemment. L’idée qu’il soit plutôt amoral, c’est à dire qu’il fonctionne en dehors de la morale, séduit aussi. Et pourtant ces deux idées sont fausses. Elles traduisent des modèles mentaux anciens mais démentis par les faits. Il ne peut y avoir de capitalisme sans morale.

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Homo Speculans: ce que l’économiste Frank Knight nous apprend sur l’incertitude et la nature humaine

Que peut nous apprendre l’ouvrage d’un économiste presque inconnu, paru il y a exactement un siècle? Beaucoup. Nous est-il utile face aux questions actuelles? Oui, très. Il se trouve que Risk, Uncertainty and Profit, écrit par Frank Knight en 1921, est un ouvrage qui, même s’il est difficile à lire, est essentiel. C’est le premier à véritablement formaliser l’incertitude et à montrer ce que cette notion implique dans la prise de décision. Et ce faisant, il nous dit aussi beaucoup sur qui nous sommes en nous révélant comme fondamentalement spéculateurs.

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Réglementation de l’IA: La logique de mort industrielle de la Commission Européenne

La Commission européenne vient de dévoiler un projet très ambitieux de réglementation des usages de l’intelligence artificielle (IA). Les plus de cent pages (!) de règles proposées couvrent un large éventail de sujets. Si les risques liés à des utilisations non éthiques de l’IA existent réellement, cette volonté de réglementation repose cependant sur une conception erronée de l’innovation technologique et pose un grave danger à l’industrie européenne en compromettant les chances que nous disposions d’acteurs majeurs dans le domaine. Si ce projet était adopté, il constituerait un formidable cadeau à la Chine et aux États-Unis.

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Raison d’être des entreprises: Spinoza reviens, la France a peur!

La France a peur. Peur de l’avenir, peur de son passé et peur du présent. Peur des autres et peur d’elle-même. Les entreprises en particulier ont peur. Peur de ceux qui exigent qu’elles justifient de leur raison d’être et qu’elles expient leurs péchés de cupidité en faisant de bonnes actions. Peur de ceux qui ne voient dans leurs usines qu’une source de pollution ou d’aliénation. Peur du prochain scandale qui révélera tel ou tel comportement inacceptable, ou devenu tel, et peur du micro-événement insignifiant monté en épingle par des médias aux aguets. Peur d’être montrées du doigt pour ce qu’elles ne font pas dans un pays qui ignore désormais largement ce qu’elles font. Peur d’exister tout simplement. Dans ce climat dans lequel chacun doit choisir son camp, et où la seule certitude est qu’à un tel jeu tout le monde sera perdant au final, il devient urgent de redécouvrir un philosophe essentiel, Spinoza. Que nous dit-il? Que c’est la joie, et non la peur, qui doit nous guider. Étrange et en apparence naïf, ce message est pourtant d’une actualité brûlante, et d’une portée très pratique.

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