Homogénéité et aveuglement: Ce que Donald Trump nous apprend sur les surprises stratégiques

L’irruption inattendue dans la campagne électorale américaine de Donald Trump, clown grotesque aux propos orduriers devenu tribun populiste, peut nous en apprendre beaucoup sur les raisons pour lesquelles une organisation en arrive à ignorer des évolutions profondes de son environnement, avec souvent des conséquences catastrophiques.

Disrupteur en chef

Personne ne l’a vu venir. Et quand finalement ils l’ont vu venir, tous étaient d’accord pour dire qu’il ne durerait pas. Mais il dure et sera sans doute le candidat des Républicains à l’élection américaine de novembre prochain. Et qui sait, peut-être le prochain président américain.

Comment une telle catastrophe peut-elle se produire? Car c’est une catastrophe. Businessman médiocre, producteur de la sinistre émission « The apprentice » où il transformait l’entreprise en lieu d’exercice sado-masochiste, tribun aux propos orduriers, racistes, xénophobes et misogynes, Trump est sans doute, et de loin, le pire candidat qui ait une chance de l’emporter. Mes amis américains sont au bord du désespoir…

Disrupteur en chef
Disrupteur en chef

Ce n’est pourtant pas la première fois qu’un outsider « disrupte » la campagne électorale américaine. Déjà Nixon l’avait fait, à la stupéfaction de l’establishment qui le méprisait. Un critique de cinéma s’étonnait alors: « Comment Nixon a-t-il gagné? Je ne connais personne qui vote pour Nixon! »

Et c’est bien là le problème. Comme l’analyse finement un article du journal American Conservative, l’une des raisons pour lesquelles Trump a pu émerger et s’installer solidement dans la course est l’aveuglement de l’élite politique américaine et singulièrement de celle du Parti Républicain. Obsédé par ses lubies religieuses, sociétales ou politiques (mettre en doute la nationalité d’Obama par exemple), le parti s’est progressivement coupé de l’électeur moyen désemparé par l’évolution de l’économie et de la société. Personne, au sein du parti, ne connaît personnellement d’électeur de Trump.

« l’homogénéité conduit à l’aveuglement et est l’une des sources principales de surprises stratégiques »

On retrouve dans cette affaire le destin tragique d’une élite qui s’isole progressivement de son environnement en développant la consanguinité. On fréquente les mêmes grandes écoles et les mêmes clubs de tennis, on se recrute entre soi, on lit les mêmes journaux, et quand on fréquente des étrangers, ils sont comme nous. Il y a ainsi plus d’affinités entre un américain et un nigérian tous deux titulaires d’un MBA qu’entre le premier et un soudeur de l’Ohio. J’ai montré, dans mon ouvrage Constructing Cassandra comment l’homogénéité est l’une des sources principales des surprises stratégiques dont a été victime la CIA dans son histoire.

Le résultat de cette homogénéité? Une partie de notre environnement devient invisible. Nous ne la voyons pas parce que nous nous sommes structurés et organisés pour ne pas la voir. Les journaux que nous lisons, les gens que nous fréquentons et avec lesquels nous travaillons, tout concoure à construire cet aveuglement.

Le succès de Trump est dû à son approche complètement disruptive: casser tous les codes de la campagne, toutes ces évidences qui n’en sont plus, et dire aux gens ce qu’ils ont envie d’entendre. Il peut donc faire des choses inimaginables: attaquer les icônes du parti, être à la fois contre la guerre en Irak et contre Wall Street, etc. En outre, sa fortune personnelle (c’est un héritier, et même sa gestion médiocre n’a pas réussi à épuiser le capital que lui a légué son père) lui a permis de ne pas solliciter les financiers habituels du Parti Républicain et donc de rester très libre de son approche et de ses propos, bref, de sa stratégie de rupture.

En face c’est l’incompréhension. Comment ose-t-il faire ça? Et pourquoi ça marche? On est bien dans l’incompréhension. L’isolement bâti durant des années empêche de voir venir, mais aussi et surtout de comprendre le phénomène lorsqu’il devient visible. Ce n’est pas qu’on refuse de comprendre, c’est qu’on en est devenu incapable. Le phénomène est alors qualifié d’aberrant et on pense s’en débarrasser de la sorte. Ainsi la CIA estime toujours que la tentative de l’URSS de placer des missiles nucléaires à Cuba en 1962, et qui a amené le monde au bord de l’annihilation, était une aberration. Du point de vue soviétique, cependant, l’opération était certes risquée mais justifiable: pour un régime en perte de vitesse, elle pouvait d’un coup rétablir l’équilibre à son avantage, et elle a été à deux doigts de réussir. L’un des problèmes de l’homogénéité est de rendre incapable de se mettre à la place de son opposant pour apprécier la situation de son point de vue. On voit cette incapacité à l’œuvre en France avec le terrorisme, notamment.

Aveuglement français

L’analogie du phénomène Trump avec la situation française est d’ailleurs frappante, et l’article d’American Conservative y fait abondamment référence, en citant notamment un article remarquable sur les migrants de Calais, écrit par Christopher Caldwell.

En effet: combien connaissez-vous d’électeurs du Front National? Je n’en connais pas. J’en étais presque fier jusqu’au moment où je me suis rendu compte que j’avais ainsi réussi à construire mon propre aveuglement. Car la vie est bien plus confortable ainsi. L’électeur du FN c’est ce plouc qui existe quelque part, mais pas près de moi, qui nous fait peur tous les 5 ans, mais comme on ne le voit pas, on se dit que les choses finiront par se tasser, qu’il n’existe pas vraiment. Il nous fait à chaque fois un peu plus peur, mais ça finira quand-même par se tasser. Ça doit se tasser.

Et encore, il n’est pas évident que ce soit le FN qui menace d’être le plus disruptif, car il est en voie d’institutionnalisation rapide. Il existe peut-être quelque part un Trump français qui s’apprête à faire irruption sur la scène politique. Ce serait une erreur profonde que de se dire que Trump ne peut exister qu’aux Etats-Unis. Le propre d’une rupture est de se produire lorsque le système en place est affaibli et qu’il devient intrinsèquement fragile, ce qui est le cas en France: les deux principaux partis n’ont plus d’idées, ne savent plus lire le monde et sont constitués d’apparatchiks déconnectés exclusivement consacrés à la sauvegarde du système existant. Tout y est: aveuglement de l’élite, transformation profondes ignorées par celles-ci, la voie est ouverte pour un aventurier. Nous sommes le pays du Général Boulanger, du Maréchal Pétain, du quarteron de généraux en retraite et du 21 avril 2002, après tout.

Les dangers de l’homogénéité ne sont bien-sûr pas limités à la politique. Je les observe depuis longtemps au sein de l’entreprise également. Nokia est un exemple désormais classique d’une entreprise ayant construit son aveuglement par un mélange d’arrogance et de consanguinité. L’arrivée de l’iPhone en 2007 a constitué un vrai choc pour l’entreprise finlandaise, alors que toute l’industrie savait dès 2006 qu’Apple préparait un téléphone. Mais comme la classe politique pour Trump, Nokia s’est rapidement remise de ce choc en estimant que l’iPhone n’était qu’un gadget et qu’il n’était aucunement menaçant. En 2008, un an après l’annonce de celui-ci, Nokia est encore capable de faire un briefing complet sur son activité sans mentionner le mot « iPhone ». L’entreprise a payé cet aveuglement de sa vie puisqu’elle s’est vendue pour une bouchée de pain à Microsoft après avoir vu sa part de marché s’effondrer en quelques mois. Combien d’entreprises françaises sont-elle aveuglées pareillement, elles dont les états-majors sont remplis de bons élèves issus d’un tout petit nombre de grandes écoles?

Pour conclure, seule une véritable diversité peut éviter à une organisation, qu’elle soit politique, gouvernementale ou industrielle, de se faire surprendre par l’évolution de son environnement. La diversité est souvent défendue pour des raisons morales, mais ici il s’agit d’une raison pratique: un univers complexe ne peut pas être compris par une organisation dont la direction est homogène. La diversité doit être inscrite dans les processus et dans le recrutement de l’organisation. Sinon, gare aux surprises…

L’article du journal American Conservative qu’on lira avec intérêt, pas seulement pour mieux comprendre l’émergence de Trump, mais aussi parce qu’il évoque longuement la situation française: « GOP RIP » de Rod Dreher. Plus récemment, voir aussi l’entretien du même Rod Dreher avec J.D. Vance, auteur de Hillbilly Elegy, ouvrage remarquable pour comprendre les électeurs de Trump: Trump: Tribune Of Poor White People.

Sur les causes de surprise stratégique à la CIA, voir mon ouvrage, « Constructing Cassandra » co-écrit avec Milo Jones. L’article de Christopher Caldwell, évoquant la situation française et les perdants de la nouvelle économie, est accessible ici: « The migrants of Calais« . A propos de l’aveuglement de Nokia, on pourra notamment lire « The bittersweet taste of hindsight.« 

Voir aussi mon article complémentaire sur le sujet: Quand l’aveuglement est volontaire: Autisme stratégique et refus de comprendre l’adversaire.

29 réflexions au sujet de « Homogénéité et aveuglement: Ce que Donald Trump nous apprend sur les surprises stratégiques »

  1. Il serait intéressant d’étudier l’aveuglement des élites. Elles sont à la fois en avance sur la masse car elles ont la capacité de manipulation l’opinion et y arrivent parfois avec succès. Cependant, je me demande toujours ces élites qui vivent en vase clos avec leur propre conception de la morale (bien souvent opposée la morale), du bien et du mal et des rapports de forces (avec l’éternel promotion des faibles) ne les rend pas a long terme aveugle. Le retour de la réalité sous forme de révolutions dans les cas les plus extrêmes est un exemple de déconnexion.

  2. Article profond qui fait le parallèle entre politique et monde économique. La conclusion m’inspire « La diversité doit être inscrite dans les processus et dans le recrutement de l’organisation. Sinon, gare aux surprises… »
    Peut-on néanmoins imaginer des surprises positives, des outsiders, en effet peu attendus, mais qui, par les mêmes mécanismes apporteraient de l’eau au moulin, de la régénérescence inattendue ? Arès tout si les surprises ne sont pas toujours mauvaises, faut-il accuser le mécanisme qui est à l’origine des bonnes comme des mauvaises ?

    1. Merci Alice. C’est un point important: oui, les surprises peuvent être positives. Mais les surprises négatives peuvent coûter très cher. En tout cas rien à mon sens ne peut justifier l’aveuglement.

    2. un exemple d’aveuglement célèbre ayant abouti a une surprise heureuse, est Christophe Colomb…
      Il a ignoré les calculs de rayon terrestre, et par entêtement imbécile et injustifié, a découvert les amériques.

      combien d’inventeurs ou de chimistes sont morts en testant leur idée imbécile pour planer.
      Et que dire de Shawyer et son EmDrive. La seule raison de le croire est expérimentale. la seule raison de ne pas le croire est théorique devrais-je dire… Le monde actuel préfère les modèles aux mesures, parce que les modèles sont cohérents et les mesures incertaines. est-ce rationnel?

      Cela rejoint la vision de Taleb qui explique que certaines options sont bénéfiques, d’autres pas.
      Des oportunité de surprise, ou des catastrophe de surprise.
      et surtout que certains systèmes sont antifragiles et d’autre fragiles.
      Un individu ou une entreprise va mourir de ses erreurs probables, comme des ses nombreux improbables, mais une espèce ou une économie va évoluer avec les rares surprises heureuses, et enterrer ses nombreux échecs comme les feuilles mortes font un humus.

      1. Bien vu! Mais Taleb souligne aussi qu’il faut s’exposer à des cygnes noirs de faible taille, ou à tout le moins réduire l’impact des cygnes.

  3. Analyse très intéressante mais à mon avis, elle démontre que vous vous placez -peut-être pas- dans ce « milieu » que je (nous) désignons politico-merdiatique. Ce milieu aveugle, qui vit confortablement ignore les besoins de la masse, de la classe moyenne et allons plus loin de la Commune. Ce même milieu qui n’a jamais vu la montée du FN parce qu’utilisant comme vous le dites très bien la reductio ad Hitlerum. Ce milieu qui favorise les minorités dominantes, convaincu qu’il a raison et que la masse suivra.
    Et on en est là, avec la majeur partie de la masse des Américains républicains, masse sous-éduquée et dénuée de sens critique, nourri à l' »entertainment » qui vote pour un candidat populiste. Peut-être était-ce la même situation avec Ronald Reagan à cette époque.
    Comme en France, l’establishement exprime son dégoût du monstre qui risque de le manger.
    L’illusion du choix entre la gauche et la droite dans les (plouto-) démo-craties est peut être en train de disparaître et c’est tant mieux si la masse n’y croit plus. Il ne resterait plus qu’a liquider cette classe mentionner ci-dessus pour vivre comme de vrais citoyens relativement libres.

    1. je n’ai pas l’impression que votre commentaire soit en désaccord avec l’article bien au contraore.

      Par contre vous semblez confondre le fait qu’on ne vois pas venir un Trump ou une Marine Lepen, ou le Brexit, ni l’importance de la loi sur les aspirateurs ou la tragédie de Calais (un reportage de RT sur Calais était fantastique de multifacette) dans ce bordel, avec le fait que ces demandes soient productives.

      L’erreur du reduction ad Hitlerium est qu’il ne permet pas de réfléchir sur la montée d’un tel phénomène, pas qu’il voit un danger.
      Il y a aussi tendance, je vous l’accorde à extremiser le discours et ne pas y voir une demande some toute banale de conservatisme et d’isolationisme.

      Parmis les critiques positive de Trump, il y a en politique étrangère le souhait d’arrêter de bombarder le moyen orient, de déstabiliser les pays de l’Est, bref de jouer au fouteur de bazar (ce qui a pousser Jacques sapir à consider que les USA ont une stratégie « Isolationiste Interventioniste » plutot que d’admettre qu’ils font n’importe quoi parce qu’ils suivent des dizaines de lobbies idéologiques et économqiues accidentellement convergents).

      J’ai aussi vu comment ses propos sur les immigrants musulmans avaien été trahis, alors qu’il sortait une réponse (trop facile et irréaliste, mais plus temporaire que l’on en l’a dit – bloquer l’immigration tant qu’on a pas compris) à un problème intelligent (mais pourquoi ils nous haissent tant) .

      Le succès de ce style de tribun est à voir surtout dans l’état du délire des indicibles, des interdites, du politiquement correct, de l’aveuglement, des contraintes internationeslles, des normes qu’on s’impose…

      l’establishment US comme européen a intégré ses propres chaines, ses boulets, et les tribuns populiste sont les seuls à en parler même s’il prétendent pouvoir les briser facilement ce qui est faux.

      on s’éloigne de l’objet de l’article, qui lui dit que tant qu’on reste dans son club, dans son grouthink où certaines idées ne sont pas « transmissibles » , on peut rater des surprises essentielles.

      Tout les jousr je me heure à ces intransmissibles.
      Des gens investisses des millions sur des choses qu’on ne peut pas dire dans les journaux, ou qui si il sont dit dans les journaux ne sont ni répétés, ni même critiqués.

      Si Airbus soutenait un projet de soucoupe volante; si woodford y mettait 50 millions$ pour avoir 5% du capital d’une startup de soucoupe volante; si les japonais via les financement NEDO (project IMPACT) avec Toyota, MHI et Nissan lancaient avec Tohoku U un labo sur les soucoupes volantes ; si un fabriquant de soucoupe volante faisait son show dans une salle de réunion à Washington avec des membres du congrès ; si après Fortune, Forbes, La Tribune et les Echos faisaient des articles sur les soucoupes volantes industrielles ; si le fond Blackrock sortait dans des rapports qu’elle suivait le dossier depuis 4ans vu son engagement sur le marché pétrolier et s’y désengagait; si les énergéticiens suédois, les société d’ingénierie norvégiennes , l’IEEE, faisaient des petites conférences ou des test ou des rapports sur les soucoupes volantes;

      si cette technologie pouvait désintégrer tout le secteur énergétique planétaire, désintéger le green business, rendre anecdotique les prévisions du GIEC, kodakiser les compagnies pétrolières, amputer les marchés boursier, et si un trader pétrolier expliquait que les banques et les états se couvrent de ce risque sur le dos des épargnants, qu’ils tenten de controler les flux d’information pour sauver les états (crypto, blockchain, cashless ) …

      (ca c’est de la surprise stratégique hein)

      eh bien, je m’attendais à ce que tout au moins des articles insultent les gestionnaire du fond Woodford, le CTO (il a démissioné, sans rapport je le sais) d’Airbus, l’administration japonaise, suédoise, norvégienne…

      ou sinon lancent une panique générale qui fera passer la peur de voir Donald Trump le nouveau POTUS pour anecdotique…

      Eh bien non.
      quelque article mal écrits, hésitent entre enthousiasme et vieilles critiques, en évitant de compter le nombre des divisions qui sont dans la bataille… une honte pour le journalisme .

      Eh non, Airbus innovation ne soutient pas un écosystème entrepreneurial de développement de soucoupe volante. C’est bien pire, et c’est public.

      Ca dérive mais franchement, Donald Trump ou Marine Lepen c’est une surprise stratégique sans grand impact a coté de ce qui nous attend. ce qui nous attend est à l’échelle de la découvert des amériques pour l’économie médiavale.

  4. @Big Ben : ne jouez pas sur les mots… Philippe accuse Trump des pires horreurs, bientôt il le comparera à Hitler, comme le font de plus en plus d’Américains de gauche. Eh bien, pour remettre un peu de vérité dans toute cette désinformation (et je pèse mes mots), voir cette vidéo de Stefan Molyneux : https://www.youtube.com/watch?v=Gw8c2Cq-vpg

      1. Je lis :

        « Donald Trump, clown grotesque aux propos orduriers devenu tribun populiste » et  » tribun aux propos orduriers, racistes, xénophobes et misogynes »

        Tout ceci est évidement faux, et l’auteur ne se hasarde pas à tenter de démontrer un seul de ces points. Il part du principe que tout cela est bien connu (ma bonne dame) et donc est déjà acté par le lecteur.

        Au demeurant, le clown grotesque est maintenant le président élu des USA, on peut donc se demander qui est vraiment grotesque de Trump ou de l’auteur.

        Mais là où ca prête a rire, c’est que le titre de l’article est « Homogénéité et aveuglement… ». Oui aveuglement de l’auteur qui croit connaître Trump parce qu’il là lu dans le monde ou un autre journal de gauche.

  5. @Jean Robin : vous n’avez pas bien lu : l’auteur n’a pas dit qu’il était raciste mais avait tenu des propos racistes.
    Vous êtes le seul à utiliser le mot « stupide ».
    Sur sa fortune, la question de savoir s’il l’a héritée ou construite ne change rien à la phrase (« sa fortune personnelle lui a permis de ne pas solliciter les financiers habituels du Parti Républicain »).
    En fait, vos remarques ne contredisent aucunement le sens de l’article.

    a+
    Bigben

  6. J’ai rarement vu un article aussi mensonger sur Trump… Héritier ? Faux. Son père est mort quand Donald était déjà milliardaire. Raciste ? Il a embauché des dizaines de milliers de personnes de toutes « races » et il est en tête chez les hispaniques et les noirs. Stupide ? Le créateur de Dilbert parle plutôt d’un génie de la communication. Etc. Etc.

  7. J’appelle cela l’effet de la nacelle que Jean de La Fontaine aurait pris plaisir à mettre ne fable.
    Le petit poulpe vit en contact avec la réalité par sa multitude de bras et de ventouses, avec sa peau propice à l’empathie. Mais voilà, petit à petit il a la tête qui enfle. A force il finit même par sortir de l’eau pour se transformer en une montgolfière reliée uniquement à la réalité du sol par ses bras étirés qui sont devenus de fins cables d’acier totalement innervés. Dans la nacelle, un petit groupe d’humains tous semblables monte, monte en altitude se détachant de la réalité pour ne s’en faire plus qu’une une vision qui lui est propre et que le groupe renforce sans cesse. Les membres divergeant auront été passés par-dessus bord ou se seront glissés dans le moule confortable de la moyenne. Ainsi on se convainc que le ballon survole un troupeau de vaches mugissant alors qu’il s’agit d’un convoi de migrants révoltés. Tout va bien, on peut dormir tranquille.

    Sortir des études de marché, du français « moyen », couper la télé, aller à la rencontre des extrêmes dans les usages et les pensées, ces mavericks incontrôlables, s’acculturer en se mettant en déséquilibre, changer de couche sociale, de groupe, ça demande un effort pour sortir ainsi de son confort douillet mais c’est tellement enrichissant. Capter ces signaux faibles permet de ne pas être autant surpris ou d’apprendre à accepter la surprise.

    Sortir des donneurs de conseils agréés consanguins que sont les McKinsey-Bain-BCG et aller chercher l’avis de ses propres associés ou d’un professeur d’école de commerce de province, c’est un peu sortir de l’aveuglement et challenger le status quo 😉

  8. la question a 500 Mds $$ est donc:
    Mais pourquoi l’homogénéité (uniformité?) est-elle prépondérante, dominatrice et ce dans a peu près tous les domaines de la vie ?
    Puisqu’elle semble être le problème central.

    1. Réflexe naturel de confort je dirais. Il est beaucoup plus agréable d’être avec des gens qui sont et pensent comme vous. Pourquoi lit-on un journal qui représente notre opinion? Normalement, on devrait lire le journal adverse, non?

    2. L’uniformité par la terreur est aussi un phénomène naturel causé par l’erreur qu’elle protège et par le cout terrible de cette erreur dans un groupe qui a la capacité de punir ses membres désobéissants.
      http://www.princeton.edu/~rbenabou/papers/Groupthink%20IOM%202012_07_02%20BW.pdf

      ce papier montre un modèle assez simple qui met la cause des pensée de groupes paradoxalement sur :
      – une décision initiale rationelle (mais en information imparfaite)
      – une décision finalement mauvaise avec de nouvelles preuves
      – des membres qui ne peuvent profiter de l’information sans l’aide des autres
      – un cout important de l’erreur pour les membres

      plus ca fait mal, plus on le défend…

      mais c’est un cas extrême pour défendre des imbécilité profondes malgré des preuves flagrantes et un cout énorme.

      le plus souvent le confort pour les souris dans le fromage suffit à expliquer le conformisme. Le groupthink arrive quand cette stratégie arrive au bout du rouleau, et qu’il faudrait l’abandonner, même égoistement.

  9. Passionnant … et bien troublant …
    La question qui se pose devient comment éviter cela ?
    Au moins, individuellement : je dirais aller lire des blogs plutôt que des journaux 😉 (ou regarder la télé) mais bon, on reste là aussi dans l’entre-soi …

    Bigben

    1. Il y a plein de techniques (que bien-sûr je n’applique pas, l’aveuglement est d’un tel confort): lire de temps en temps un journal totalement inconnu, si possible étranger (Times of India, par exemple), diversifier ses contacts, etc.

  10. Très intéressante observation.

    la description de la cause de l’aveuglement
     » Une partie de notre environnement devient invisible. Nous ne la voyons pas parce que nous nous sommes structurés et organisés pour ne pas la voir. Les journaux que nous lisons, les gens que nous fréquentons et avec lesquels nous travaillons, tout concoure à construire cet aveuglement. »

    me rappelle la description du paradigme de kuhn.

    http://www.uky.edu/~eushe2/Pajares/Kuhn.html
    http://mip-ms.cnam.fr/servlet/com.univ.collaboratif.utils.LectureFichiergw?ID_FICHIER=1295877018064

    les gens naifs disent que les preuves peuvent convaincre, mais il y a deux chose qui empêche les faits, les preuves, de convaincre :
    1- ce ne sont pas des faits acceptables (mauvaise source, mauvaise méthode, conflit)
    2- ces faits sont interprétés différemment c’est une fraude, conspiration, erreur, biais, corruption…
    3- la logique elle même n’est pas la même. en tête la relation à l’idéologie, la révélation, la théorie… comme ces gens qui disent qu’il y en a mare de la dictature du rationalisme basé sur les trucs qui marchent, les thérapies qui réparent, les lois qui rapportent, les expériences réussient… et qui préfèrent les idéologies, les théories, les révélations, les modèles, les espoirs, les rêves.

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