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La source du dilemme de l’innovateur: 3 – Les trois types de clients

Ce billet est le troisième d’une série sur l’innovation de rupture et le modèle d’affaire.

L’un des impératifs les plus dangereux qui soient, et que l’on rencontre pourtant à tout bout de champ, est celui d’être “orienté-client”. Par cet anglicisme, ce que l’on veut dire c’est que les entreprises qui réussissent sont celles qui connaissent parfaitement leurs clients et répondent à leurs moindres souhaits. Or dans la première partie de cette série, nous avons, au travers de l’exemple du fabricant d’imprimante, montré que ce n’était pas toujours vrai. En effet, lorsque le fabricant va proposer sa nouvelle imprimante jet d’encre, dont le prix d’achat est inférieur mais le coût à l’impression supérieur, ses clients n’en veulent pas, et trouver ceux qui pourraient être intéressés (les “non-clients” actuels) est difficile, sans même parler de la difficulté qu’il y aurait à les atteindre.

Dans la deuxième partie de la série, nous avons montré comment un modèle d’affaire peut empêcher une entreprise de répondre à une attaque dans l’entrée de gamme et ainsi voir celle-ci se retrouver dans une logique de fuite vers la haut de gamme, mortelle à terme, car elle laisse un nombre croissant de ses clients sur-servis par son offre produit.

Ce que ces exemples suggèrent, c’est que l’impératif d’orientation client n’est pas faux en lui-même mais doit être pensé en fonction de trois types de clients:

L’important ici est de reconnaître que l’entreprise doit avoir en fait une stratégie marketing à trois volets, chacun adapté aux particularités de ces trois catégories de clients. Pour les clients actuels, la stratégie consiste à toujours améliorer les produits actuels. C’est ici que la notion d’orientation-client est pertinente. Pour les clients sur-servis, il doit d’abord s’agir de les repérer (ils s’en vont en silence généralement) pour construire une offre spécifique. Pour les non-clients, la stratégie est totalement différente: il doit s’agir de construire une offre entièrement nouvelle. Or c’est très difficile car l’offre n’est pas en continuité avec l’offre existante: Un appareil photo numérique n’est pas une amélioration d’un appareil à film argentique. Un téléphone mobile n’est pas un téléphone fixe amélioré. Un four à micro-onde n’est pas un meilleur four qu’un four normal. C’est pour cela que l’offre aux “non-clients”, qui correspond à l’innovation de rupture, est si difficile pour les entreprises.

D’un point de vue organisationnel, la mise en oeuvre de cette stratégie à trois volets est évidemment difficile. Ce point est abordé dans la quatrième partie de la série: La réponse organisationnelle.

Voir le premier billet de la série: “La rupture de nouveaux marchés“.

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