iPhone: le bon, et le moins bon

Je suis donc propriétaire d’un iPhone depuis un mois maintenant, et je crois utile d’en faire un bilan. L’une des raisons, et non des moindres, est que le métier de Digital Airways, mon entreprise, c’est l’interface utilisateur, et que l’iPhone est généralement présenté comme une rupture majeure dans le domaine. je voudrais expliquer pourquoi, au final, l’iPhone est un curieux mélange d’élégance et de bricolage.

Mais avant tout, l’iPhone est une expérience désagréable dans sa prise en main. On ne s’y serait pas attendu avec Apple, mais l’inconfort est réel. D’abord, pour activer son téléphone, il faut s’inscrire sur iTunes, et donner son numéro de carte bancaire. Dans la catégorie hostile, c’est le must. Ensuite, l’objet lui-même. Disons-le tout de suite, il est superbe. Dense, d’une finition parfaite, finalement pas si gros, il est ce qu’on été autrefois les Nokia de la grande époque ou les iPods. Mais les choses se gâtent quand il faut passer à l’action. D’abord, on ne trouve pas le manuel. Mes collègues, qui ont ouvert la boîte avant moi, m’ont assuré qu’Apple ne livrait pas de manuel "c’est dans l’esprit, vois-tu", avec un clin d’oeil. Oui, sauf qu’impossible de trouver l’endroit où se trouve la carte SIM. Il faudra longtemps pour découvrir le petit trou, et encore plus pour trouver un trombone, mais pas n’importe lequel, un de petite taille, et ouvrir la boîte magique. Finalement, je trouverai quelques jours plus tard le manuel, enfermé voyez-vous dans le carton qui sépare le téléphone du reste du package. Bien caché.

Lançons-nous dans l’utilisation. L’écran tactile est magnifique,
d’une grande précision, très clair. Mais comme tout est tactile, et que
l’utilisateur moyen a des gros doigts, tout est écrit gros, et
finalement cela mange pas mal d’espace… Après un mois d’utilisation,
le tout tactile me semble un choix lourd de conséquence, qui est
parfois peu pratique. Pas mal de manipulations se feraient plus
rapidement avec une petite molette comme on en trouve sur les autres
téléphones. Apple semble avoir une position idéologique sur les boutons
(pas de soft keys, par exemple), et pourtant ne pas s’y tenir: il me
faudra plusieurs heures pour trouver comment passer en mode silencieux.
Devinez quoi, c’est un bouton spécial sur la gauche. Pourquoi un bouton
pour cela?

Plus généralement, les choix en matière d’ergonomie sont souvent
déconcertants. On a eu tendance, lors de la sortie de l’appareil, à
confondre effets graphiques et ergonomie. Des effets graphiques,
l’iPhone en est plein: mail qui se plie comme du papier quand vous le
supprimez, effets de zooms en entrée ou sortie d’application, le fameux
zoom + et – avec les deux doigts, etc. Tout cela est fort
impressionnant et superbement exécuté. Mais l’ergonomie, derrière tout
ça, est parfois mauvaise. Dabord l’absence de notion de boutons de
validation et d’annulation, pourtant si classique dans la téléphonie et
même le PC. Il en résulte un flou quand au résultat de nos actions qui
est le contraire même de ce que doit être une interface utilisateur.
Ensuite parce que ces mécanismes de validation ne sont pas toujours
consistants. Parfois, il s’agit d’effectuer un "Retour" (mais ai-je
sauvé mes paramètres?), parfois rien, il faut simplement passer à une
autre application grâce à l’unique bouton physique.

Editeur de SMS: si quelqu’un sait comment placer le curseur dans une
partie du texte pour la modifier, je suis preneur, de même si quelqu’un
sait comment utiliser le moteur prédictif: ah, il me propose plein de
mots intéressants, mais je ne sais pas comment les sélectionner.

A propos du clavier: très joli, indéniablement, mais beaucoup de
fautes de frappes dues à l’imprécision du pavé tactile. Il m’arrive
souvent, par exemple, de taper sur "Supprimer" au lieu de retour.

Bizarrerie: il n’y a pas d’entrée par le carnet d’adresse. Il faut aller dans "Téléphone".

Incohérence: l’icône du calendrier, sur le menu principal, affiche
la date du jour. En revanche, l’icône de l’horloge n’affiche pas
l’heure exacte, mais toujours 10h20. De même, la température n’est pas
la vraie. Y aurait-il des développeurs plus feignants que d’autres chez
Apple? Quant on sait que la cohérence est l’un des principes de base de
l’interface utilisateur…

Autre problème: le tout tactile fait que l’on active souvent des
fonctions par inadvertance. Je montrais mes photos à ma fille et
celle-ci a déclenché un appel, je n’ai pas encore compris comment. De
même, en mettant l’objet dans la poche, je déclenche souvent une
fonction. C’est d’autant plus embêtant que je ne sais pas comment
verrouiller moi-même la machine, ce que n’importe quel téléphone normal
sait faire. Je ne parle pas de l’appareil photo (misérable en terme de
qualité) tellement sensible que je prends toujours trois photos au lieu
d’une. Si quelqu’un sait comment supprimer une pellicule (c’est comme
ça qu’ils appellent les albums chez Apple), merci de me le dire je n’ai
pas encore trouvé.

Autre détail, la synchronisation Outlook, où l’on tombe dans
l’écueil classique de la synchronisation complète. Impossible de
synchroniser uniquement certaines catégories, je me retrouve donc avec
678 contacts sur mon iPhone, donc beaucoup que je n’appelle jamais (mon
vieux copain Alec aux US, par exemple). Parlante de synchronisation,
l’interface iTunes est complexe, chaque fois que je veux transférer des
MP3 de mon disque à l’iPhone, je dois m’y reprendre à plusieurs fois
tant le vocabulaire utilisé est compliqué.

Navigation Web: Safari est un excellent navigateur qui fonctionne
bien. Sauf que surfer avec Edge, c’est à peine possible. J’ai essayé
d’utiliser Google Maps en voiture, ce n’est pas jouable: c’est trop
lent, l’écran est trop petit. Google News à la limite, car c’est du
texte…

Les contacts: c’est sans doute l’endroit le plus mal conçu de cette
machine. Ah c’est sûr, faire défiler ses contacts de haut en bas et de
bas en haut à toute vitesse avec un doigt, ça impressionne les filles.
Mais trouver rapidement Dupond Jean parmi ces contacts, c’est
impossible. D’abord parce que pour accéder directement à une lettre, il
faut taper dans une minuscule alphabet disposé verticalement sur la
droite. Tellement petit que si vous voulez taper sur M, vous tapez
invariablement sur L ou N. Dans n’importe quel téléphone, un appui sur
quelques touche vous amène directement aux contacts voulus. On paie ici
le prix du dogmatisme "tout tactile" qui pénalise fortement
l’expérience utilisateur. Je ne parle même pas du fait qu’en faisant
défiler les contacts du bout du doigt, on appuie souvent un tout petit
peu trop fort et on ouvre le contact en question, interrompant le
défilement. C’est horripilant.

L’iPhone est donc un très bel objet, mais il traduit selon moi un
manque de maturité fort de la part de ses concepteurs sur la question
de l’interface utilisateur, et cela en rend l’utilisation relativement
inconfortable. Mais l’engouement qu’il a suscité (les choses semblent
se calmer apparemment) n’en est que plus surprenant. N’en doutons pas,
le prochain iPhone sera mieux conçu.

5 réflexions au sujet de « iPhone: le bon, et le moins bon »

  1. Pour éviter que la dalle ne s’active dans ta poche il faut une brève impulsion sur le bouton d’arrêt général (bouton chromé sur le dessus) pour mettre l’appareil en veille forcée, je n’ai jamais eu de soucis avec ça.
    Pour avoir un clavier plus confortable, ne pas hésiter à incliner le tél à l’horizontale avant d’ouvrir la fonction clavier. Le clavier est plus large, du coup les boutons aussi.
    Have fun

  2. au sujet de l’éditeur de texte, pour placer le curseur > rester appuyé sur le texte, une petite loupe apparaît avec le point d’insertion !
    pour le reste je trouve l’outil plutôt génial.
    je suis d’accord sur l’appareil photo très perfectible
    les autres téléphones offraient déjà l’internet dans la poche mais Apple a su le rendre pratique (j’ai un iPhone 3G) ; euh en plus il est très beau non ?

  3. Quoi de mieux pour présenter des effets graphiques qu’une seule dalle tactile ? pas de surplus inutiles genre molette de direction qui pouraient enlever le plaisir d’utiliser un des effets graphiques (peut-être cachés, à nous de les trouver!) en déplaçant nos doigts boudinés…et qu’ils sont beaux ces effets pour une si petite boite !
    et en plus il téléphone …

  4. bonjour,
    A propos de l’éditeur de SMS, j’ai mis un peu de temps à comprendre. Si l’éditeur propose dans la petite bulle le mot que vous voulez mettre, il faut taper espace et il est pris en compte. Si non il faut taper avec son petit doigt boudiné sur la bulle en question , et il laisse le mot que vous vouliez mettre au départ.
    J’espère avoir répondu à la question.
    Je serais beaucoup moins négative que vous, mais je n’ai pas trop l’experience d’autres appareils similaires.
    Je dois avoir la chance d’avoir des doigts assez fins qui ne me posent pas trop de problèmes.
    Je suis d’accord avec vous pour les contacts et les icônes complètement incohérentes.
    Moi j’ai la désagréable surprise de ne pas pouvoir reprendre mes contacts de ma carte SIM. eh oué mon vieux téléphone n’était pas bluetooth, et là vous êtes marrons pour faire la récup.
    Sinon visionner des films dans le train ou métro reste un plaisir maxi, la qualité de l’image est superbe.
    C’est clair qu’on ne peut pas considérer cet outil comme ouvert, venant du monde du pc, j’ai dû un peu me mettre à Apple, safari, itunes, la gestion des contacts, j’ai dû changer d’adresse email, les encodages spécifiques de musique et de vidéo au format adéquat etc .. c’est le comble je trouve. Mais dans la balance ça va, je retire beaucoup de plaisir à utiliser l’iphone, donc j’accepte ces ‘sacrifices’ et autres problèmes.
    Mais donnez moi un exemple d’outil multimédia parfaitement intégré (seamless on dirait en anglais) où il n’y a pas de retravail d’interfaçage ou autre …;-)
    Bon courage

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