Le viaduc de Millau : derrière l’exploit, un festival d’innovations

La technique des ponts haubannés remonte au XVIIIème siècle. Mais différents incidents, notamment des ruptures consécutives à des oscillations déclenchées par le vent, ont mis cette approche en quarantaine jusque vers les années 1960. A revoir à ce sujet : le film de l’effondrement du Tahoma Bridge aux Etats-Unis (1940). Quelques images disponibles sur http://www.thefilmvault.com/disasters/tahoma_bridge.html.

Le viaduc de Millau a beaucoup été mis en avant pour différents records. La hauteur de ses piles tout d’abord ; la pile 3 avec 221m et la pile 2 avec 245m (343m avec le pylone supportant les haubans) pulvérisent évidemment le précédent record pour la catégorie (180 m). La portée entre piles ensuite ; avec 340m, le record précédent (140m) pour un pont métallique semble bien court. Mais l’intérêt de l’ouvrage est ailleurs, dans les nombreuses innovations qui ont été mises en oeuvre pour ce chantier hors du commun.

La plus importante d’entre elles est la conduite simultanée du chantier des pylones en béton d’une part, et de la fabrication puis de l’assemblage des caissons métalliques du tablier d’autre part. Un responsable d’Eiffage estimait hier que cette innovation avait permis de mener à bien le projet avec un délai inférieur de 15 mois par rapport à une approche traditionnelle.

Pour éviter la réédition d’un accident de type "Tahoma Bridge", tous les ponts suspendus doivent subir des tests d’aérodynamique. Le viaduc de Millau n’a pas échappé à la règle, mais Météo France a innové en mettant au point une "veine hydrolique", une maquette au 1/3000è de la vallée et du pont en construction, dans laquelle on fait circuler de l’eau et de minuscules billes pour repérer la trajectoire des vents. Une première en France.

Dernier exemple ; l’utilisation d’un outil de positionnement GPS avec une précision au … millimètre. Résultat ; avec seulement deux géométres pour un chantier de 500 personnes, l’ouvrage est resté dans la marge d’erreur fixée à … 5 millimètres !

Autant d’innovations invisibles pour le futur usager de ce tronçon d’autoroute, mais qui auront permis à Eiffage de réaliser ce projet dans les temps (39 mois pour 40 prévus), et dans le budget (399,5 millions d’Euros pour 400 budgétés).

2 réflexions au sujet de « Le viaduc de Millau : derrière l’exploit, un festival d’innovations »

  1. C’est tout à fait exact: cela illustre bien que l’innovation n’est pas que technologique. Un point que Jim Collins, encore lui, avait déjà souligné lorsqu’il parlait d’innovation sociale. Selon lui, la force d’un 3M ou d’un Siemens, ce n’est pas d’inventer des produits, mais d’avoir créé une organisation qui crée de tels produits. Les innovations organisationnelles telles que vous mentionnez sont donc fondamentales.

  2. On a beaucoup parlé des innovations technologiques dans la construction du Viaduc de Millau, mais on a moins parlé de l’innovation dans le financement. Eiffage a financé seul cet ouvrage. Mais l’intéressement des salariés aux résultats d’Eiffage et l’impact du rendement du viaduc de Millau sur la rentabilité globale de l’entreprise a conduit l’ensemble des salariés à se mobiliser d’une manière rarement atteinte pour que :
    1 le viaduc puisse être construit le plus rapidement possible,
    2 Le coût de l’ouvrage ne dépasse pas le budget prévu.
    De sorte que c’est parce qu’ils sont intéressés et que chaque salarié et collaborateur peut avoir accés à une partie du retour sur investissement que ces innovations techniques ont pu avoir lieu…

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